De retour au Canada! Ce gigantesque pays sur lequel j'avais déjà mis les pieds pour la première fois à l'occasion de la fin du voyage de mon ami Alexis en 2015. Cependant, cette fois je n’atterrissais pas à Toronto mais à Vancouver. Je voyais mon retour à la société occidentale comme une expérience paisible et facile qui permettrait de terminer ce grand voyage en douceur dans le calme et la sérénité, devant des paysages de sapins et de lacs émeraudes. Ce n'est pas tout à fait dans le calme et la sérénité que s'est déroulé cette fin de voyage. Mon retour à la société occidentale anglo-saxonne nord-américaine a contrasté violemment avec mes récentes expériences sud-américaines. Le Canada fut une étape compliquée pleine de belles expériences mais aussi d'autres assez difficiles. Je ne pourrai pas en vouloir aux Canadiens, qui furent généralement d'une gentillesse déstabilisante ni aux coût de la vie qui correspond à celui d'une société moderne. Pourquoi ne puis-je pas dire que cette étape fut aussi brillante que les précédentes? Les raisons sont contextuelles à mon voyage. Je ne suis pas un voyageur éternel, le moment du retour était proche mais également désiré pour de multiples raisons. Les gens qui pensent que j'ai été "en vacances" pendant ces 11 mois de voyage ne comprendraient pas. J'arrivai le 1er août au Canada, à Vancouver, et je retrouvai la société occidentale dans sa qualité et ses plus grand travers.

Les principaux sites de réservation que j'avais l'habitude d'utiliser (Booking.com, Airbnb, HostelWorld) n'étaient pas accessibles depuis Cuba. Une fois à Cuba, il m'était impossible d'anticiper la moindre réservation à moins de contacter un ami ou de la famille afin qu'il puisse effectuer une réservation pour moi, ce que je n'ai pas fait et j'ai probablement eu tort. Mon arrivée à Vancouver fut douloureuse puisque que je réalisai seulement à mon arrivée combien il allait être difficile de voyager durant les deux premières semaines d'août au Canada sans aucune réservation. Tout était si facile à Cuba que je n'avais pas pris le temps de me préparer à la société canadienne.

Le contraste entre la société cubaine et la société nord-américaine a provoqué chez moi un certain malaise: j'arrivai d'un monde où on manque de tout pour arriver dans celui qui semblait avoir de trop. De tout mon voyage, je n'avais jamais vu un contraste culturel aussi important et j'ai eu quelques problèmes à m'adapter à la société nord-américaine. J'ai ressenti un certain malheur de retrouver ce monde que je connaissais si bien, qui m'avait été si familier, où je me sentais désormais comme un étranger. La société nord-américaine a certains travers plus marqué qu'en Europe: Les villes sont généralement pensées pour s'y déplacer en voiture et celles-ci ont des tailles démesurées, tout comme les campings car, les super-marchés, les rues, les maisons, les appareils d'électro-ménagers et beaucoup d'autres choses. Tout me paraissait gros, grand, lourd, énorme, imposant et démesuré. Je pouvais à nouveau mettre le papier dans les toilettes et plus dans la poubelle, partout l'eau était à nouveau potable, le Wifi était gratuit et les gens ne se parlaient plus dans la rue mais à leur téléphone. Les paradoxes et les contradictions de la société moderne m'ont un peu fatigué. Le manque d’authenticité était criant, sans parler du coût de la vie ou l'arnaque institutionnalisée et légalisée. J'ai fini par me l'avouer, d'une certaine manière, le continent sud-américain me manquait. 

Au Canada, on finit par oublier ces grandes villes et leurs centres commerciaux insupportables par la nature et les paysages sauvages absolument magnifiques. Cependant, la chance n'était pas tout à fait avec moi en ce début du mois d'août: j'ai passé les premiers jours dans un épais brouillard causé par les nombreux incendies sévissant alors en British Columbia. En effet, depuis plusieurs années, il fait trop sec dans l'ouest canadien et chaque année, des milliers d’hectare de forêt brûlent, relâchant des quantités importantes de fumée qui, une fois soufflées par les vents, laissent un épais brouillard similaire à celui des jours de forte pollution de Paris, lorsque la Tour Eiffel est à peine visible et que Montmartre est noyé dans un brume jaunâtre. Ce brouillard a été présent durant la moitié de mon voyage au Canada et a impacté ,de facto, mes impressions à divers endroits. 

Heureusement, ce brouillard s'est parfois dissipé laissant entrevoir les merveilles naturelles des régions de la British Columbia et de l'Alberta: Des glaciers fabuleux, des lacs de couleur émeraude, des forêts de sapin infinie, des chutes d'eau magnifiques, des rivières à l'eau translucide. Après les Alpes et les Andes, je découvrais en cette fin de voyage les merveilles des Rocheuses canadiennes. La faune est également très riche et j'ai pu en observer une petite partie: Les ours noirs chassant dans les rochers des plages du parc de Cape Scott, les pygargues blanche perchées dans les hauteurs des sapins, les loutres chassant l'anguille, les hérons se baladant à marée basse, les grosses marmottes peu farouches, les pikas couinant à tue-tête, les nombreux écureuils en quête de nourriture, les saumons qui remontent les rivières et les cerfs qui broutent au milieu du camping. Les petits ports de la côte est de l'île de Vancouver ont parfois des airs pittoresques avec leurs pontons en bois près desquels des pêcheurs à la mouche tentent leur chance tandis que de petits bateaux de pêche longent la côte tranquillement. J'ai passé quelques temps dans la ville de Victoria: "Plus britannique que les britanniques eux-même" disait mon hôte d'auberge à Port Hardy, ce qui n'était pas faux. La ville avait du charme, j'y ai passé du bon temps et j'y ai fait de belles ballades. Je n'oublie pas l'amabilité des canadiens car même si j'ai eu quelques malchances à mon arrivée au Canada, c'est bien la gentillesse de certains canadiens qui m'a permis de sortir de certaines impasses et de vivre de très belles expériences. 

Je ne pourrai pas prétendre que la gastronomie canadienne est riche et excellente, en revanche je prétends qu'elle a su s'inspirer de manière excellente des cuisines du monde entier. Pour information, à Vancouver, la population est désormais à 50% d'origine asiatique. Au canada, j'ai pu goûter de tout, pour le meilleur et pour le pire. J'ai su retrouver les plaisirs de mon voyage de l'année 2015 où j'avais pu goûter des bières ambrées absolument excellentes.

J'ai découvert durant ce voyage ce qu'avait représenté le Canada de l'ouest au XVIIIe siècle ainsi que les siècles qui ont suivi. Les tentatives de colonisation réussies et celles qui ont échoué par l'éloignement des territoires et la rudesse de la vie sur place. Son histoire rappelle beaucoup celle de la Nouvelle-Zélande, et les quelques observations que j'ai pu avoir sur les confrontations entre les colons et les premiers peuples de ces régions m'ont rappelé les réflexions que j'ai pu avoir sur la culture maori en Nouvelle-Zélande et la culture Inca au Pérou (voir Colonisation et quête d'identité nationale).

Cette fois-ci, je le sens, c'est différent. Je mets mon sac sur mes épaules, je me mets en route pour l’aéroport mais cette fois-ci il semble que je ne vais plus à la découverte d'une nouvelle culture, de nouveaux paysages, d'une nouvelle langue et de nouvelles personnes. Il semble que je prends le chemin de la maison pour un moment. Ce que j'aime, c'est que cela me paraît logique, comme si les choses se déroulaient de manière parfaitement proportionnée. Ce qu'on croit, c'est qu'une fois que je serai en France, mon voyage se terminera. Pourtant, mon voyage est loin d'être terminé. Je disais à un ami: "Mon voyage a commencé quand j'ai décidé d'acheter mes billets d'avion et il se terminera quand je ne serai plus à vivre les conséquences de ce choix"...soit peut-être jamais.