C'est l'adaptation récente au veganisme d'une amie qui a renouvelé mon intérêt sur le sujet. Un sujet qui porte rapidement sur nos propres valeurs, sur le sens de la vie et le rapport que nous entretenons avec la nourriture quotidienne et les animaux. La personne qui s'intéresse à ce qu'elle a dans son assiette devrait prendre le temps de se forger une idée élaborée sur le sujet.
Une partie du livre de J.Rifkin sur le ressentiment d'empathie chez l'Homme, possède toute une partie dédiée à la question de l'empathie chez les animaux. Selon moi, son argumentation est suffisamment bien construite pour établir de facto dans cet article que les animaux sont capables de faire preuve d'empathie envers d'autres animaux de leur espèce mais aussi d'espèces différentes. Ce livre, qui est un peu ma bible, défend la théorie que l'Homme aurait comme premier instinct l'empathie. Tuer un individu capable de ressentir vos émotions par ses propres aptitudes empathiques serait donc contre nature. La plupart des sociétés d'aujourd'hui possèdent un code civil qui suit plus ou moins cette idée, mais seulement pour les hommes. Je ne sais pas quelles sont les considérations sur lesquelles nous nous appuyons, mais il est de l'ordre du naturel de tuer un être vivant différent de l'Homme pour le manger, quand ce n'est pas pour une autre raison. Il faut bien comprendre que je ne suis pas forcément un grand passionné des animaux, je n'aurai jamais pu en faire la passion de ma vie, mais je considère l'être animal comme mon égal sur cette planète Terre. Je ne pense pas avoir plus le droit de vivre qu'un petit poussin ou qu'un poisson. Il se trouve seulement que je suis plus grand et plus fort.
Le panel d'arguments pour justifier la prise de position en tant que carnivore, végétarien ou vegan est extrêmement varié et il m'est arrivé d'entendre n'importe quoi, pas seulement pour ceux qui défendent leurs habitudes! Les mauvais arguments sont souvent les mêmes. Je comprends seulement les végétariens qui le sont par conviction et non pas par religion. Il y a le fait de tuer l'animal qui leur paraît contre nature et surtout la production industrielle de la viande contre laquelle ils protestent en cessant la consommation de viande. L'Allemagne connaît un mouvement du végétarisme très important, la France commence seulement et sa culture culinaire importante freine la mouvance. En Nouvelle Zélande, il y avait beaucoup de végétariens parmi les jeunes que j'ai rencontré. En quittant l'Europe, je me disais que je n'aurai pas besoin de devenir végétarien, la population le deviendrait dans les 30 prochaines années et je préfère m'y adapter quand il sera plus facile de l'être. En réalité, ce discours cache une grande difficulté de ma part à changer une habitude profondément encré dans ma vie. Comme beaucoup de gens, j'aime beaucoup la viande et le poisson et sous toutes leurs formes. J'adore les déguster, parler de la façon de les cuisiner, évoquer les souvenirs de saveurs mémorables. Me priver de ces plaisirs serait synonyme d'une diminution de qualité de vie mais aussi du vecteur social que cela représente. C'est probablement le seul point de ma vie où mes valeurs sont autant en décalage avec mes actions.
J'ai de sérieux doutes sur ce que les gens appellent la consommation responsable. Il s'agit de manger moins de viande et de sélectionner seulement celle dont on connaît la provenance. J'aimerai être plus responsable dans ma manière de consommer de la viande mais j'avoue ne pas être un exemple en la matière.
En arrivant au Chili, le décor a changé. Ici, les gens mangent du cochons, du bœuf, du poulet, du mouton, du lapin, en grande quantité et tous les jours. Votre hôte aura tendance à s'inquiéter pour votre bonne santé si vous déclinez un plat à base de viande ou de poisson.
En Amérique du Sud, les gens vous parlent beaucoup de la qualité de la viande, des spécialités, des plats qu'il faut goûter. J'ai du mal à imaginer tenter l'expérience du végétarisme au travers d'une telle expérience culturelle. 
J'ai récemment discuté avec des vétérinaires qui sont au plus proche des animaux, qui comprennent parfois mieux leur comportement et comment la peur, la détresse, la douleur se manifestent chez eux. La réponse était simple et toujours la même: il n'y a pas de plaisir comparable à savourer une côte de bœuf grillée au barbecue dans le jardin familiale. L'habitude et le plaisir surpasse le fait de tuer l'animal. 
Nous aimerions justifier notre appétit pour la viande et le poisson au même titre que les prédateurs mais cet argument me paraît bien trop facile. Il se base sur des animaux dont les habitudes alimentaires n'ont jamais changé. L'Homme n'a fait que changer de régime ces deux derniers millénaires et il est quasiment capable de tout manger, alors doit-il vraiment continuer à tuer des animaux pour satisfaire son plaisir culinaire...?